Définition

Homologie taxique (Guillaume Lecointre)

Première mise en ligne le 3 Février 2025, écrit par Guillaume Lecointre.

En 1982, Patterson distingue l’homologie transformationnelle de l’homologie taxique [1]Patterson, C. (1982). Morphological characters and homology, In Joysey K.A. and Friday, A.E. (Eds.) Problems of phylogenetic reconstruction, London and New York: Academic Press, pp. 21-74. [2]Nelson, G., & Platnick, N. I. (1991). Three-Taxon Statements : A More Precise Use of Parsimony? Cladistics, 7(4), 351-366. [3]Nelson, G.J. (1994a). Homology and systematics, In Hall, B.K. (Ed.) Homology, the hierarchical basis of comparative biology, New York: Academic Press, pp. 101-149. [4]Nelson, G.J. (2011). Resemblance as Evidence of Ancestry, Zootaxa 2946, 137-141. (voir la discussion de cette distinction dans Brower 2014 [5]Brower, A.V.Z. (2014). Transfomational and taxic homology revisited. Cladistics, 2014, 1-5.). La relation d’ancêtre à descendant intéresse les individus réels (ce qu’il y a à classer), la relation entre taxons est une relation d’inclusion conceptuelle (ce qui classe). Ainsi, les « oiseaux » ne « descendent » pas des « reptiles », ils en sont. La confusion entre la relation qui intéresse les populations d’individus (la descendance, la transformation) et celle qui intéresse les taxons (inclusion à l’aide d’une hiérarchie par emboîtement) fut vivement reprochée à l’école dite « éclectique » de la classification, qui affirmait que les « oiseaux descendent des reptiles ». La phrase correcte, c’est que les oiseaux sont inclus dans les reptiles (relations entre taxons). En cherchant seulement des relations de groupes-frères entre espèces (et non plus des relations d’ancêtres à descendants, empiriquement inaccessibles), la systématique phylogénétique standard admet que les relations taxiques ne sont pas des relations d’ancêtre à descendant, mais des relations d’inclusion dans un système classificatoire qui hiérarchise du plus général au plus particulier (qu’on utilise un diagramme de Venn ou un graphe connexe non cyclique orienté). Lorsqu’on mène une analyse phylogénétique d’un échantillon d’espèces, la relation d’ancêtres à descendants est théoriquement requise mais empiriquement inaccessible. La relation d’inclusion entre concepts classificatoires nous est en revanche accessible à l’investigation. Ce que la systématique phylogénétique standard admet ainsi pour les groupes taxonomiques (le caractère conceptuel et abstrait de nos ensembles), elle ne l’a pourtant pas admis pour les attributs. Pourtant, « écaille » ou « plume » sont des ensembles abstraits, eux aussi, qui désignent une foule d’individualités : toutes les plumes ne sont pas identiques. Ils ne descendent pas les uns des autres, ils devraient s’emboîter les uns dans les autres comme il convient de le faire pour des ensembles. Ainsi, on passe de l’homologie transformationnelle (hypothèse d’homologie primaire selon laquelle l’état « plume » du caractère « phanères » (codé 1) est une version transformée de l’état « écaille » (codé 0)) à l’homologie taxique (l’état plume est un cas particulier de l’état écaille, l’ensemble « plume » est inclus dans l’ensemble écaille : l’homologie devient une hiérarchie [6]Nelson, G.J. and Platnick, N. (1981), Systematics and biogeography: cladistics and vicariance, New York: Columbia University Press.). Le cas particulier est diagnostique d’un groupe, c’est-à-dire qu’il va servir à regrouper des espèces, le cas général ne l’est pas. L’homologie transformationnelle est de l’ordre de l’inférence, l’homologie taxique est de l’ordre de l’investigation concrète. Cette dernière conception de l’homologie va nourrir l’approche classificatoire appelée « 3ia » (pour three-item analysis [7]Nelson, G., & Platnick, N. I. (1991). Three-Taxon Statements : A More Precise Use of Parsimony? Cladistics, 7(4), 351-366.), ou les rapprochements entre espèces (ou entre aires biogéographiques) s’élaborent par relations élémentaires au sein de triplets (deux d’entre trois items sont regroupés), et où l’on calcule une arborescence qui rend compte de la cohérence hiérarchique du plus grand nombre possible de relations tripartites entre taxons.

References

References
1 Patterson, C. (1982). Morphological characters and homology, In Joysey K.A. and Friday, A.E. (Eds.) Problems of phylogenetic reconstruction, London and New York: Academic Press, pp. 21-74.
2 Nelson, G., & Platnick, N. I. (1991). Three-Taxon Statements : A More Precise Use of Parsimony? Cladistics, 7(4), 351-366.
3 Nelson, G.J. (1994a). Homology and systematics, In Hall, B.K. (Ed.) Homology, the hierarchical basis of comparative biology, New York: Academic Press, pp. 101-149.
4 Nelson, G.J. (2011). Resemblance as Evidence of Ancestry, Zootaxa 2946, 137-141.
5 Brower, A.V.Z. (2014). Transfomational and taxic homology revisited. Cladistics, 2014, 1-5.
6 Nelson, G.J. and Platnick, N. (1981), Systematics and biogeography: cladistics and vicariance, New York: Columbia University Press.
7 Nelson, G., & Platnick, N. I. (1991). Three-Taxon Statements : A More Precise Use of Parsimony? Cladistics, 7(4), 351-366.

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